ou alors sinon

Tu es là, tranquille, innocent, en train d’écrire un texte anodin sur la chute des cheveux chez les cultivateurs de rutabaga en milieu aqueux pour la gazette de la fanfare de Melun. Tu es plutôt content de toi, surtout y a un endroit tu as fait une métaphore.

Tu te méfies pas trop de ton pc. Tu le prenais pour un copain. Mais ces trucs là, c’est comme des jeunes chatons, un clin d’oeil d’inattention et paf, ils te font une connerie. Pendant que tu tapais, il t’a fait des corrections automatiques. Même qu’un moment, il t’a remplacé XIXème siècle par Xixème siècle, avant de te dire que non, écris plutôt XIXe. Toi, ça te va aussi, ça fait deux signes de moins. Mais là, il te le souligne impétueusement en rouge parce que dans son dictionnaire, il a que IXe. Là, bon, tu gagnes encore un signe mais tu perds dix siècles d’un seul coup, ça peut quand même poser problème à la compréhension générale de ton texte de base, un peu.

Mais bon. Quand tu arrives au bout de ton texte, sans te méfier de rien, tu pèses, d’un doigt gracile et langoureux, sur la touche F7. Et du coup, c’est toi qui a envie de lui flanquer une correction, à ce con de pc. Parce que merde, un nom que tu portes depuis au moins des générations, il vient te dire que non, c’est pas français, mais il te propose des solutions de remplacements. Alors toi, comme tu l’aimes bien, ton pc, deux mille balles il t’a coûté, tu prends le téléphone et tu appelles l’état civil. Après dix minutes de musique d’attente (du Schubert ou du Clayderman, tu sais pas trop), tu renonces et tu pèses sur ignorer.

Et ainsi de suite. jusqu’à la goutte de vase qui fait déborder l’eau. Il vient te dire, comme ça, sans scier de sourd, que ton texte est aisément compréhensible mais offre un niveau d’abstraction un peu élevé, quand même, genre. Deux mille balles, il t’a coûté. Et il vient te parler comme ça. Alors c’en est trop. Tu l’éteins comme on t’a dit, en le démarrant pour l’arrêter, et tu vas prendre l’air histoire de faire le point sur votre relation. Tu montes dans ta voiture que tu démarres tout court, ce serait idiot de l’arrêter avant.

Et là, au bout d’un moment, d’une voix quand même un peu de salope, ta voiture vient te dire de tourner à droite dans cinq cent mètres. Tu lui obéis, elle t’a coûté bien plus de deux mille balles, alors tu vas pas commencer à la fâcher au premier virage venu. Mais quand même, cette histoire de tourner à droite, c’est bizarre, ils avaient dit à la télé que des inconnus ont déplacé le pont pour faire des travaux ou alors pour déconner, tu sais plus.

Et alors là, tu te dis non mais c’est pas possible, c’est quand même pas ça, la chute, et ben si.

One Response to “ou alors sinon”

  1. fractalite aigüe says:

    rhââ les machines…